Si la littérature devient passion, c’est bien que tout est dans les livres !

Les masques de la nuit ⇜ Pieter Aspe

 

Sorti en mars 2009 chez Albin Michel. Roman policier. 318 pages. Traduit du néerlandais par Marie Belina-Podgaetsky et Emmanuèle Sandron.

[quote]En deux mots
Pédophilie, corruption au plus haut de l’état et de la bourgeoisie, prostitutions et ballets roses… Le sujet de cette troisième enquête du commissaire brugeois est noir, très noir. Mais Van In et sa garde rapprochée ne se laissent ni impressionner ni corrompre par les notables de Bruges. Un livre osé, efficace et agréable à lire en dépit de sa noirceur.[/quote]
L’auteur. Pieter Aspe est un auteur belge néerlandophone. Né à Bruges en 1953, il commence par faire de nombreux petits boulots, notamment travailleur social et photographe, avant de se consacrer totalement à l’écriture en 1996. Il est l’auteur de nombreux romans policiers parmi lesquels la série du commissaire Van In qui compte une trentaine de volumes. Sa série a rencontré un gros succès en Belgique et aux Pays-Bas, son personnage est devenu une star du roman policier. Presque tous ses romans se déroulent dans sa ville de Bruges (et ses alentours) qu’il connaît par cœur et que nous découvrons avec plaisir. Plusieurs opus ont été adaptés dans une série télévisée flamande et lui ont valu en 2001 le Prix Hercule Poirot.
L’histoire. Cette nouvelle enquête du commissaire Pieter Van In, la troisième, commence avec la découverte par une petite fille, dans un jardin de la banlieue de Bruges, de fragments d’un squelette humain. Le père appelle la police, l’affaire est confiée au commissaire Van In et à Hannelore Martens, substitute au procureur de Bruges. Tous deux forment un couple à la ville depuis la première enquête, Le carré de la vengeance, et Hannelore est enceinte.
Très vite, ils découvrent que la maison était autrefois un bordel de luxe, Le Love, que fréquentaient les notables les plus en vue de la région et que les ossements retrouvés appartenaient à un homme, dont l’identification ne sera pas facile, qui a été assassiné en 1986.
Aidés du sympathique adjoint Versavel et de leur fine équipe, ils feront tout pour démanteler un réseau de prostitution, de pédophilie et de corruption à grande échelle dans lequel trempent des politiques, des hauts fonctionnaires d’état, des entrepreneurs, des avocats, des « huiles » de tous milieux, y compris la police…
Le style est plutôt léger pour ce genre de lecture. Si le sujet est lourd (prostitution, pédophilie et corruption active), l’écriture, alerte, enlevée, remplie d’humour et d’autodérision de la part de Van In, permet une lecture facile et agréable.
Mon avis sur le livre. Le couple Pieter-Hannelore forme là encore un duo de choc. Toujours aussi bons vivants et… perspicaces, les sympathiques tourtereaux nous invitent à les suivre à la fois dans leur vie privée avec l’attente de leur premier enfant (angoisse de l’amniocentèse pour la mère, et peur de ne pas être à la hauteur pour le futur père), et dans les méandres d’une enquête classique comportant des interrogatoires, des perquisitions et des gardes à vue, mais assez chaotique dans son déroulement.
Le suspense savamment entretenu et l’intrigue bien ficelée ne laissent au lecteur aucune envie de reposer le livre avant le rebondissement final. L’enquête se déroule en plusieurs endroits, les suspects sont nombreux mais nous ne sommes pas perdus pour autant.
Cela dit, s’il reste distrayant, essentiellement grâce au charisme et à l’opiniâtreté de l’équipe d’enquêteurs, Van In en tête, le roman raconte une histoire très sombre, probablement inspirée par l’affaire Dutroux qui éclata peu avant son écriture. Et l’on sent que l’auteur a été profondément choqué par cette affaire comme toute la société belge. Il fustige les pédophiles de tous bords et, peut-être davantage encore, ceux qui occupent des postes si haut placés dans l’échelle sociale et politique qu’ils en sont insoupçonnables et intouchables. Par le biais de l’écriture, il nous montre l’écœurement, la répulsion et le mépris qu’il éprouve pour ces agissements et ceux qui les commettent. Certaines scènes sont particulièrement repoussantes, voire insupportables, dans les dernières pages. Mais suffisamment spectaculaires pour justifier une adaptation cinématographique ou télévisuelle, ainsi que le grand succès que connaissent ses enquêtes.
En fin de compte, une lecture particulièrement attrayante en ces journées chaudes propices au farniente. Quant à moi, je reviendrai très vite en Belgique, des fois que Bruges m’y soit conté.
Pour le plaisir, un bref passage dans lequel nous pouvons apprécier le degré d’estime que porte le commissaire Van In aux notables les plus fortunés. Page 66 nous lisons : « … Mais les méthodes qu’il employait pour mener ses enquêtes n’étaient pas des plus orthodoxes. Convaincu qu’en tout capitaliste sommeille un assassin, il n’était jamais autant dans son élément que lorsqu’il pouvait clouer au pilori un citoyen au-dessus de tout soupçon ».
Et plus loin, page 78 : « Les riches ne se montrent prodigues qu’avec des babioles ou des vieilleries inutiles ».

 

 

Commentaire(s):

  1. Bonne nouvelle : la Serial Lectrice revient faire une tournée des librairies en Belgique pour trouver matière à de nouvelles et excellentes chroniques, comme celles de Peter Aspe ! J'en redemande... encore !

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